samedi 27 février 2010

Baguettes chinoises de Xinran



Baguettes chinoises
, de Xinran, Ed. Philippe Picquier, 2008, 335 p

"Baguettes" est l'expression utilisée dans la campagne de l'Anhui pour désigner les filles, utilitaires et fragiles, contrairement aux "poutres", c'est-à-dire aux garçons, qui soutiennent une maison.

La mère des soeurs Trois, Cinq et Six est considérée plus bas que terre car, malgré ces six enfants, elle n'a pas réussi à "pondre un oeuf". De même leur père est la risée du village car il n'a pas été capable de "planter sa graine". Il n'a pas donné de noms à ces filles qui portent à la place le numéro de leurs naissances.
Comment mieux résumer la non-valeur de l'existence des filles, dans les mentalités de la campagne ?
Et encore, heureusement que leurs oncles font partie de " la brigade de production" ce qui permet à la famille d'être nombreuse (normalement les naissances sont régulées en Chine à cette période), sinon il est probable que les sœurs aînées auraient connu des "morts naturelles" à répétition.
Nous ne sommes pas dans la Chine ancienne, mais à notre époque, l'histoire se passe vers les années 90 et 2000.

Malgré cela le roman n'est pas sombre. L'écriture, sans être transcendante, et fraîche, souvent pleine d'humour.On plonge dans l'atmosphère. On suit volontiers l'histoire de ces trois soeurs dans leur périple à Nankin, la ville voisine. Elles souhaitent travailler et prouver qu'elles aussi peuvent soutenir une maison.

Elles vont vivre un choc entre deux mondes, la campagne et la ville, que des siècles semblent séparer. La ville vit à l'heure de l'ouverture aux étrangers, des jeans taille basse, d'internet, et des appareils photos numériques...La campagne est comme figée, sans aucune ouverture, dans une extrême pauvreté et étroitesse d'esprit.

Assistante dans un centre curatif, serveuse dans un salon de thé lettré, aide dans un restaurant..
à travers les trois métiers qu'elles exercent, le portrait de la ville, de ses habitants et de la difficile conversion vers la modernité est subtilement dressé.

vendredi 26 février 2010

Au secours ! Sauvons notre école de Sébastien Clerc




Au secours ! Sauvons notre école de Sébastien Clerc, oh! éditions, 2008, 228p


L'auteur commence par un état des lieux reposant à la fois sur son expérience d'enseignant et sur celles de collègues qu'il a interrogé. Les transgressions et violences sont bien restituées et parleront à tous les profs même ceux qui n'enseignent pas dans des zones difficiles.
La seconde partie est consacrée à l'analyse des causes de cette situation. Sébastien Clerc a ici une approche globale où "chacun doit prendre ses responsabilités", ce qui un changement appréciable par rapport à d'autres livres consacrés à ce même problème. Enfin la troisième partie recense des "pistes de solutions" concrètes pour les différentes causes du problème.

Ces propositions sont effectivement " chocs", comme annoncées dans la présentation, et même parfois choquantes !
Elles sont innovantes et pour beaucoup très intéressantes:
"cours de parentalité" pour informer et sensibiliser les parents dans leur rôle éducatif, système de mutualisation des cours au niveau national validés par les inspecteurs et notés par les professeurs après les avoir testés en classe, imposition d'une période de 3 ans après la titularisation dans des établissements calmes pour se former d'abord au métier de prof avant de devoir gérer en priorité la discipline, repenser le salaire au mérite, réduire le turn over des établissements, changer la formation en introduisant dès le début des stages avec des vrais cours devant des élèves, revaloriser l'enseignement technique et professionnel etc etc.

Certaines de ces solutions paraissent très difficiles à mettre en place, ou bien posent immédiatement d'autres problèmes (comme la régionalisation des concours pour faire baisser le turn over des équipes) mais d'autres sont réalisables.

La lecture de ce livre est facile, et donne à la fois un bon point de vue à l'intérieur des coulisses d'un établissement, ainsi que des idées assez originales pour remédier aux problèmes récurrents rencontrés.

mercredi 24 février 2010

Madame, Vous êtes une prof de merde ! de Charlotte Charpot




Madame, Vous êtes une prof de merde !, de Charlotte Charpot, ed. de l'arbre, 2009, 215p

Présentation de l'éditeur

"Charlotte Charpot est une jeune enseignante parachutée pour sa première affectation dans la banlieue de Nîmes au sein d'un établissement devenu au fil des agressions et des incidents un bunker pour ses professeurs et ses élèves. Rien ne lui sera épargné : les élèves qui défèquent derrière les portes, les enfants battus par leurs parents, les caillassages de voiture et l'indifférence de sa hiérarchie. Epuisée par ses années d'enseignement, Charlotte décide de rejoindre Bruxelles et d'enseigner dans la capitale de l'Europe là, où le système scolaire applique ce qui n'est encore en France qu'au stade de recommandations du Ministre de l'Education nationale. Voilà l'auteur, plongée dans la réalité du " flexi-prof ", ce prof qui au gré des horaires enseigne le français, l'histoire, la géo et les claquettes ? Pourquoi pas si le directeur de l'établissement l'exige. Ce n'est pas tout, voici maintenant venu le temps des insultes proférées par les élèves, les parents ou les " grands frères ". Le temps des menaces physiques, des intimidations sans oublier la monstrueuse attitude d'un directeur qui, par son refus de sanctionner la violence au profit d'un sordide racolage d'élèves, mène l'auteur au bord du gouffre. Cette histoire cynique, dure et vraie est celle du parcours d'un prof emblème de tous les profs. Eux qui doivent assurer une " garderie sociale " face l'abandon de l'autorité parentale, négocier, ruser, résister à la violence verbale, psychologique et physique des élèves. Mais ce que dénonce ici l'auteur, c'est la violence interne de l'Ecole : violence de l'abandon des enseignants par leur hiérarchie, violence du détricotage de la solidarité inter-profs, violence des règlements internes souvent flous ou non adaptés à cette nouvelle génération d'élèves, enfin, violence politique de réformes mal pensées. Comment survivre sans devenir fou de souffrance ?"

Mon avis

Ce témoignage évoquera probablement des situations vécues chez tous ceux qui sont passés par l'expérience du professorat: Situations absurdes, malaise et isolement face à certains cas, relations avec la hiérarchie et l'administration.. etc. ça me parle donc d'une manière directe même si j'ai quitté très vite l'Education Nationale, en n'ayant connu qu'une classe "normale" d'adolescents !
Bref une lecture parfaite pour relativiser (ou catastropher c'est selon !) de sa situation de prof ou bien pour ne pas regretter d'être partie!
L'écriture est assez fraîche et souvent pleine d'humour, de plus l'auteur ne se complait pas dans un simple récit de ses malheurs égo-centrés.
La situation de l'enseignement en Belgique laisse effectivement songeur quand aux réformes actuelles en France.

samedi 20 février 2010

Le Club des Incorrigibles Optimistes de Jean-Michel Guenassia


Le club des Incorrigibles Optimistes,
Jean-Michel Guenassia,Ed. Albin Michel, 2009, 759 p


Présentation de l'éditeur :

"Michel Marini avait douze ans en 1959. C'était l'époque du rock'n'roll et de la guerre d'Algérie. Lui, il était photographe amateur, lecteur compulsif et joueur de baby-foot au Balto de Denfert-Rochereau. Dans l'arrière-salle du bistrot, il a rencontré Igor, Léonid, Sacha, Imré et les autres. Ces hommes avaient passé le Rideau de Fer pour sauver leur peau. Ils avaient abandonné leurs amours, leur famille, trahi leurs idéaux et tout ce qu'ils étaient. Ils s'étaient retrouvés à Paris dans ce club d'échecs d'arrière-salle que fréquentaient aussi Kessel et Sartre. Et ils étaient liés par un terrible secret que Michel finirait par découvrir. Cette rencontre bouleversa définitivement la vie du jeune garçon. Parce qu'ils étaient tous d'incorrigibles optimistes. Portrait de génération, reconstitution minutieuse d'une époque, chronique douce-amère d'une adolescence : Jean-Michel Guenassia réussit un premier roman étonnant tant par l'ampleur du projet que par l'authenticité qui souffle sur ces pages. "

Commentaire :


Après 80p, l'envie fut grande de refermer ce livre...mais comme plusieurs personnes m'en avaient dit du bien, je me suis sentie obligée d'en lire au moins la moitié avant de renoncer (et j'ai quand même réussi à le finir).

Pourquoi ?
Parce que le style est très ennuyeux ( pour ne pas chercher un autre adjectif). C'est clairement le point ( le plus) faible du roman. L'amour de l'auteur pour les successions interminables de verbes au passé composé, énumérant des actions, y est peut-être pour quelque chose...

La première moitié de ce roman nous présente avec application des personnages, notamment Michel Marini, personnage principal sensé servir de fil conducteur dans ces 700 p et sensé présenter habilement la multitude des réfugiés politiques des pays de l'Est, concentrés dans un improbable club d'échecs.
Michel Marini, donc, est un "adolescent rebelle", ou plutôt il est la caricature d'un adolescent rebelle, comme son amie Cécile. Tous les deux " éclatent de rire" à toutes occasions ( parfois trois fois par pages), ils emmerdent les voisins, se disputent tout le temps...

On a l'impression que Michel est l'image rêvée que l'auteur aurait aimé être à cet âge:
oui il aurait séché les cours, et il aurait lu tout le temps d'abord, et même pendant les cours et même en marchant, c'est trop un rebelle, il se construit tout seul tu vois. ah oui et pis c'est un cador au baby-foot, il aime la musique rock et pis il fait des photos.
Oui mais bon ça sonne faux, comme les engueulades avec sa maman, comme la complicité avec son papa, comme les chatouilles avec Cécile...

Cécile ne supporte pas les conseils, elle fume et porte des vêtements trop grands pour elle, elle boit du café au lait à tous les paragraphes...c'est une petite chose fragile, elle tente de se suicider elle adore la fontaine Médicis du Luxembourg et elle fascine notre personnage principal. soit.

La construction du roman est assez classique : en gros un chapitre sur la vie de Michel et un autre sur un morceau de la vie d'un des réfugiés et on recommence.

Les histoires des réfugiés joueurs d'échecs ne sauvent pas le roman. Elles sont souvent banales, parfois amusantes, parfois ridicules ( L'aviateur passant à l'ouest pour vivre une histoire d'amour torride avec une steward ( rousse je crois bien)... semble sorti d'un roman harlequin) . Une sort cependant du lot, celle de Sacha photographe, ex-retoucheur d'images pour le parti communiste. C'est un des rares passages où l'on ressent quelque chose, comme une petite empathie pour ce personnage, comme une lueur d'intérêt pour son histoire.




mardi 2 février 2010

Ru de Kim Thuy


Ru, de Kim Thuy, édition Liana Levi (5 janvier 2010), 143 p.

Présentation de l'éditeur :
Une femme voyage à travers le désordre des souvenirs : l'enfance dans sa cage d'or à Saigon, l'arrivée du communisme dans le Sud-Vietnam apeuré, la fuite dans le ventre d'un bateau au large du golfe de Siam, l'internement dans un camp de réfugiés en Malaisie, les premiers frissons dans le froid du Québec.
Kim Thúy a quitté le Vietnam avec d'autres boat people à l'âge de dix ans. Elle vit à Montréal depuis une trentaine d'années. Son parcours est hors du commun. Elle confie avoir fait toutes sortes de métiers - couturière, interprète, avocate, restauratrice - avant de se lancer dans l'écriture (en français) de ce premier roman.


J'ai été touchée par ce roman.
L' écriture, sans artifice, est d'une originalité remarquable, très évoquatrice.
De même la construction, basée sur l'enchaînement des souvenirs et non sur une histoire chronologique, sort du commun via une succession de courts chapitres. Les souvenirs évoqués sont bien sûr douloureux, mais ils ne versent pas dans le pathos. Kim Thuy (d)écrit sans morale mais avec émotion. La narratrice évoque sa vie au delà de l'épisode boat people, et s'interroge aussi sur la construction de l'identité.
Probablement un des meilleurs romans de ce début d'année !

Van Gogh par David Haziot


Cette biographie de Van Gogh est tout à fait remarquable. Elle nous permet réellement d'approcher l'homme et le peintre hors du commun qu'il fut. Sa vie et son caractère semble souvent sortir d'un roman et de ce fait la lecture de cette biographie est passionnante (sans doute aussi parce qu'elle a été écrite par un passionné) !

Résumé de sa vie :

Son enfance dans une famille puissante (oncle marchand d'art, père pasteur...) fut malgré tout relativement austère et se termina rapidement par un abandon des études vers 15 ans alors qu'il avait montré des dispositions impressionnantes pour les langues. Avec le soutien de son oncle il commence une carrière de marchand de tableau avec succès. On l'envoie alors à Londres, toujours pour la firme Goupil. Il y tombe malheureusement amoureux d'Eugénie Loyer, avec excès, refusant d'admettre son refus, ce qui le pousse dans une sévère dépression. Ses illusions de bonheur avec cette femme se brisent entraînement avec elles ses aspirations à un confort et à une installation "bourgeoise". Il devient un poids pour la firme Goupil qui le mute à Paris, il décide alors de la quitter.

Il se tourne vers la bible, et enchaîne des métiers afin de revenir à Londres, ce qui le brise de nouveau. Vincent est alors "placé" par ses parents dans une librairie, où il ne travaillera pas mais traduira la bible en trois langues! Il est persuadé qu'il a la vocation pour être pasteur, ce dont tout le monde doute. Malgré tout il réussit à convaincre ses parents de l'aider à payer des cours pour préparer le concours d'entrée dans une faculté de théologie à Amsterdam. C'est encore un échec. Vincent s'engage alors dans une école d'évangélisation où il est renvoyé pour indiscipline, malgré cela il est envoyé en évangéliste dans le Borinage. Il se conduit là-bas de manière exaltée, profondément touché par la misère des mineurs. Il se conduit comme un martyr, refusant de garder tout confort, détruisant ses vêtements pour en faire des bandages, ne se lavant plus... Il fait preuve d'une exaltation et d'une conduite excessive telle qu'il est tout juste considéré comme un fada par les mineurs. C'est à ce moment qu'il commence réellement à dessiner pour témoigner, d'où sa première période de "peintre social". Il est rapidement démis de ses fonctions d'évangélistes.

Théo, devenu marchand d'art, commence à l'aider financièrement, afin que Vincent puisse se consacrer à l'étude et devenir peintre : Vincent part de loin puisqu'il ne sait pas réellement dessiner, il ne maîtrise pas l'anatomie, ni la perspective.. et travaille comme un fou, recommençant sans cesse pour s'améliorer. Vincent revient chez ses parents, par nécessité. Il veut épouser sa cousine Kate Vos-Striker, veuve, ce qui provoque refus, scandale et brouille dans sa famille, qu'il quitte donc pour s'installer à la Haye. Il y sera un temps l'apprenti de Mauve, mais se brouillera avec lui. Il y vivra avec Sien, une prostituée ayant deux enfants qu'il souhaite épouser ce qui ne se fera pas face à l'opposition de toute sa famille et son manque de revenu. Ce sera le temps de l'apprentissage.Il demande sans cesse plus d'argent à Théo, contractant des dettes pour acheter des tubes de couleurs, payer sans cesse des modèles ( car il voulait maîtriser le portrait).. jeunant, se privant au point que de graves ennui de santé apparaissent (il perd une partie de ses dents). Malgré ces privations, il continuera de dépenser de l'argent chez "les filles", où il attrape la syphilis, ainsi que de boire et de fumer.. toujours avec excès!

Cette misère le pousse à choisir entre son art et Sien, et finalement à revenir chez ses parents à Nuenen (où il attend de leur part des excuses pour l'épisode Kate !! ). Une idylle s'y noue avec Margo Begeman, sans suite. Ses années ainsi que les suivantes montrent son caractère particulièrement difficile, très égoïste, sans concession et prompt à la dispute, qui est lié à sa conduite excessive. Son père meurt, il renonce à sa part d'héritage et coupe les ponts avec une bonne partie de sa famille.

Vincent part pour Anvers, où le choc des Rubens l'amène à mettre de la couleur dans sa peinture et à quitter sa palette si noire. Il débarque ensuite à Paris, où il vit avec Théo et découvre (tardivement) les impressionnistes mais surtout les "nouveaux peintres" (Toulouse-Lautrec, Pissaro,..) et l'art Japonais ainsi que la théorie des couleurs de Chevreul. Il se fait des amis (les copains). Il s'exerce. Sa palette s'éclaircit beaucoup quand il peint dans les environs ( dont Asnières..).

Ayant besoin de lumière et de couleurs, Vincent part pour Arles où il peint sans arrêt, se décrivant comme une locomotive. Il peint vite, avec fureur. Il a enfin trouvé son style, il a confiance en l'avenir, il est heureux "comme une cigale". Mais une nouvelle catastrophe se prépare. Gauguin, qu'il avait rencontré à Paris et qu'il tient en très haute estime a des difficultés financières, Vincent souhaite l'aider et commence à faire une véritable fixation sur ce dernier. Gauguin ne voit en Vincent qu'un peintre de second ordre, entretenu dans son délire par son frère, et son orgueil lui indique que l'admiration de ce dernier est bien normale. Il reste en bon terme avec lui, car c'est le frère du seul marchand de tableau qui accepte ses toiles et essaye vraiment de les vendre. Après avoir beaucoup tergiversé et n'ayant pas vraiment d'autres solutions, il se rend à Arles où Vincent a tout préparé pour l'accueillir comme "le maitre". L'atelier du Midi a vocation pour Vincent à concrétiser (à terme) une solidarité entre les peintres, une association qu'il a toujours appelée de ses vœux entre peintres pauvres. On retrouve ici le Vincent "social" et idéaliste. Mais cette collaboration fut désastreuse pour Vincent. Persuadé depuis le début de l'importance de partir du réel, (la peinture étant la nature vu par un tempérament pour reprendre l'expression de Zola) il se fait peu à peu convaincre du contraire par Gauguin, pour qui la peinture vient de l'imaginaire. C'est une profonde remise en cause , il en vient à considérer toutes ces toiles précédentes comme de simples études, et à se déprécier totalement. Gauguin étouffe depuis le début dans cette relation, son influence rend Vincent de plus en plus instable et il décide de partir. La nuit précédant son départ, Vincent fait sa première grande crise et se coupe l'oreille gauche. Il est interné. Alterne alors des passages de rémission totale et de nouvelles crises, avec des tentatives de suicides. Vincent reste dépressif, pour lui , il est un raté, sa peinture ne vaut rien, il conseille sans cesse à son frère de jeter la plupart des toiles qu'il lui envoie!! Alors que ces toiles finissent par être remarquées par d'autres artistes et quelques critiques (notamment Albert Aurier), Vincent considère que ce succès n'est pas mérité. Malgré tout durant ces périodes à Saint-Rémy, où il a demandé son internement, la peinture l'aide à se calmer. Mais c'est surtout une lettre de Gauguin lui adressant des félicitations pour ses peintures (vues lors du salon des indépendants) qui lui permet de sortir de cette dépression.

Vincent revient alors sur Paris et s'installe à Auvers-sur-Oise sous la surveillance du Docteur Gachet. Mais celui-ci, branché nouvelles médecines et charlataneries diverses, l'estime guéri et ne le "surveille" pas. Théo, persuadé également de sa guérison, lui parle de ses problèmes financiers. Cela se passe très mal avec ses patrons de la firme Goupil, un licenciement est envisageable, et c'est lui qui fait vivre leur mère, ainsi que sa propre famille (sa femme Johanna et leur bébé Vincent). Vincent angoisse et culpabilise d'être un fardeau (il l'a toujours mal vécu, mais cette fois il a l'impression de "voler le pain" du nouveau-né) pour sa famille et les lettres suivantes assurant qu'une solution serait trouvée, qu'il n'avait pas à s'en faire ne servent à rien. Il décide de se tuer, et essaye (lucidement contrairement aux tentatives précédentes) en se tirant une balle le 27 juillet 1890 dans la poitrine. Il se rate et rentre difficilement dans sa pension il va se coucher. C'est dans la soirée seulement que l'on se rend compte de la situation. Le docteur est appelé mais il ne fait rien, la balle étant près de la colonne vertébrale, il ne décide pas non plus de faire venir un chirurgien ou de transférer Vincent. Théo accourt et accompagne Vincent jusqu'à la fin le 28 juillet. Après la mort de son frère Théo est brisé, il culpabilise de la mort de son frère, et perd littéralement la raison après un conflit avec ses patrons.. en moins de 6 mois, il est interné, fait une crise cardiaque, tombe dans le coma et meurt fin janvier 1891. C'est peu de dire que la fin de ces deux frères fut tragique. Johanna, contrairement aux avis de son propre frère, décide de lire leurs correspondances et finalement de consacrer sa vie à faire connaître l'œuvre de Vincent.


Ce livre est très réussi car-au delà des données purement biographiques- il nous permet de comprendre Vincent:
-Sa relation difficile avec son père.
-La profonde et réciproque amitié qui le liait à son frère Théo (sans qui il n'aurait jamais pu se mettre à la peinture!).
- Son caractère presque impossible. Théo dira d'ailleurs de lui "C'est comme s'il y avait deux personnes en lui, l'une merveilleusement douée, délicate et tendre; l'autre égoïste et de cœur dur. Elles se présentent tour à tour..[...]c'est bien dommage qu'il soit son propre ennemi".......
-et surtout sa relation à la peinture: quelles étaient ses ambitions et sa conception de l'art. On se rend compte de l'importance de sa relation avec la nature, de l'admiration sans borne qu'il lui voue par les longues descriptions de promenades envoyées à Théo, avant même de s'engager dans la peinture. La nature fut d'abord décrite par Vincent avant d'être représentée par la peinture, et la retranscription de l'émotion a toujours été son objectif.
Isolé et inclassable, Vincent est une figure de génie et a marqué la peinture, ouvrant la voie au fauvisme, à l'expressionnisme...

en construction

ici bientôt , qq notes de lectures dans toutes les directions