mardi 2 février 2010

Van Gogh par David Haziot


Cette biographie de Van Gogh est tout à fait remarquable. Elle nous permet réellement d'approcher l'homme et le peintre hors du commun qu'il fut. Sa vie et son caractère semble souvent sortir d'un roman et de ce fait la lecture de cette biographie est passionnante (sans doute aussi parce qu'elle a été écrite par un passionné) !

Résumé de sa vie :

Son enfance dans une famille puissante (oncle marchand d'art, père pasteur...) fut malgré tout relativement austère et se termina rapidement par un abandon des études vers 15 ans alors qu'il avait montré des dispositions impressionnantes pour les langues. Avec le soutien de son oncle il commence une carrière de marchand de tableau avec succès. On l'envoie alors à Londres, toujours pour la firme Goupil. Il y tombe malheureusement amoureux d'Eugénie Loyer, avec excès, refusant d'admettre son refus, ce qui le pousse dans une sévère dépression. Ses illusions de bonheur avec cette femme se brisent entraînement avec elles ses aspirations à un confort et à une installation "bourgeoise". Il devient un poids pour la firme Goupil qui le mute à Paris, il décide alors de la quitter.

Il se tourne vers la bible, et enchaîne des métiers afin de revenir à Londres, ce qui le brise de nouveau. Vincent est alors "placé" par ses parents dans une librairie, où il ne travaillera pas mais traduira la bible en trois langues! Il est persuadé qu'il a la vocation pour être pasteur, ce dont tout le monde doute. Malgré tout il réussit à convaincre ses parents de l'aider à payer des cours pour préparer le concours d'entrée dans une faculté de théologie à Amsterdam. C'est encore un échec. Vincent s'engage alors dans une école d'évangélisation où il est renvoyé pour indiscipline, malgré cela il est envoyé en évangéliste dans le Borinage. Il se conduit là-bas de manière exaltée, profondément touché par la misère des mineurs. Il se conduit comme un martyr, refusant de garder tout confort, détruisant ses vêtements pour en faire des bandages, ne se lavant plus... Il fait preuve d'une exaltation et d'une conduite excessive telle qu'il est tout juste considéré comme un fada par les mineurs. C'est à ce moment qu'il commence réellement à dessiner pour témoigner, d'où sa première période de "peintre social". Il est rapidement démis de ses fonctions d'évangélistes.

Théo, devenu marchand d'art, commence à l'aider financièrement, afin que Vincent puisse se consacrer à l'étude et devenir peintre : Vincent part de loin puisqu'il ne sait pas réellement dessiner, il ne maîtrise pas l'anatomie, ni la perspective.. et travaille comme un fou, recommençant sans cesse pour s'améliorer. Vincent revient chez ses parents, par nécessité. Il veut épouser sa cousine Kate Vos-Striker, veuve, ce qui provoque refus, scandale et brouille dans sa famille, qu'il quitte donc pour s'installer à la Haye. Il y sera un temps l'apprenti de Mauve, mais se brouillera avec lui. Il y vivra avec Sien, une prostituée ayant deux enfants qu'il souhaite épouser ce qui ne se fera pas face à l'opposition de toute sa famille et son manque de revenu. Ce sera le temps de l'apprentissage.Il demande sans cesse plus d'argent à Théo, contractant des dettes pour acheter des tubes de couleurs, payer sans cesse des modèles ( car il voulait maîtriser le portrait).. jeunant, se privant au point que de graves ennui de santé apparaissent (il perd une partie de ses dents). Malgré ces privations, il continuera de dépenser de l'argent chez "les filles", où il attrape la syphilis, ainsi que de boire et de fumer.. toujours avec excès!

Cette misère le pousse à choisir entre son art et Sien, et finalement à revenir chez ses parents à Nuenen (où il attend de leur part des excuses pour l'épisode Kate !! ). Une idylle s'y noue avec Margo Begeman, sans suite. Ses années ainsi que les suivantes montrent son caractère particulièrement difficile, très égoïste, sans concession et prompt à la dispute, qui est lié à sa conduite excessive. Son père meurt, il renonce à sa part d'héritage et coupe les ponts avec une bonne partie de sa famille.

Vincent part pour Anvers, où le choc des Rubens l'amène à mettre de la couleur dans sa peinture et à quitter sa palette si noire. Il débarque ensuite à Paris, où il vit avec Théo et découvre (tardivement) les impressionnistes mais surtout les "nouveaux peintres" (Toulouse-Lautrec, Pissaro,..) et l'art Japonais ainsi que la théorie des couleurs de Chevreul. Il se fait des amis (les copains). Il s'exerce. Sa palette s'éclaircit beaucoup quand il peint dans les environs ( dont Asnières..).

Ayant besoin de lumière et de couleurs, Vincent part pour Arles où il peint sans arrêt, se décrivant comme une locomotive. Il peint vite, avec fureur. Il a enfin trouvé son style, il a confiance en l'avenir, il est heureux "comme une cigale". Mais une nouvelle catastrophe se prépare. Gauguin, qu'il avait rencontré à Paris et qu'il tient en très haute estime a des difficultés financières, Vincent souhaite l'aider et commence à faire une véritable fixation sur ce dernier. Gauguin ne voit en Vincent qu'un peintre de second ordre, entretenu dans son délire par son frère, et son orgueil lui indique que l'admiration de ce dernier est bien normale. Il reste en bon terme avec lui, car c'est le frère du seul marchand de tableau qui accepte ses toiles et essaye vraiment de les vendre. Après avoir beaucoup tergiversé et n'ayant pas vraiment d'autres solutions, il se rend à Arles où Vincent a tout préparé pour l'accueillir comme "le maitre". L'atelier du Midi a vocation pour Vincent à concrétiser (à terme) une solidarité entre les peintres, une association qu'il a toujours appelée de ses vœux entre peintres pauvres. On retrouve ici le Vincent "social" et idéaliste. Mais cette collaboration fut désastreuse pour Vincent. Persuadé depuis le début de l'importance de partir du réel, (la peinture étant la nature vu par un tempérament pour reprendre l'expression de Zola) il se fait peu à peu convaincre du contraire par Gauguin, pour qui la peinture vient de l'imaginaire. C'est une profonde remise en cause , il en vient à considérer toutes ces toiles précédentes comme de simples études, et à se déprécier totalement. Gauguin étouffe depuis le début dans cette relation, son influence rend Vincent de plus en plus instable et il décide de partir. La nuit précédant son départ, Vincent fait sa première grande crise et se coupe l'oreille gauche. Il est interné. Alterne alors des passages de rémission totale et de nouvelles crises, avec des tentatives de suicides. Vincent reste dépressif, pour lui , il est un raté, sa peinture ne vaut rien, il conseille sans cesse à son frère de jeter la plupart des toiles qu'il lui envoie!! Alors que ces toiles finissent par être remarquées par d'autres artistes et quelques critiques (notamment Albert Aurier), Vincent considère que ce succès n'est pas mérité. Malgré tout durant ces périodes à Saint-Rémy, où il a demandé son internement, la peinture l'aide à se calmer. Mais c'est surtout une lettre de Gauguin lui adressant des félicitations pour ses peintures (vues lors du salon des indépendants) qui lui permet de sortir de cette dépression.

Vincent revient alors sur Paris et s'installe à Auvers-sur-Oise sous la surveillance du Docteur Gachet. Mais celui-ci, branché nouvelles médecines et charlataneries diverses, l'estime guéri et ne le "surveille" pas. Théo, persuadé également de sa guérison, lui parle de ses problèmes financiers. Cela se passe très mal avec ses patrons de la firme Goupil, un licenciement est envisageable, et c'est lui qui fait vivre leur mère, ainsi que sa propre famille (sa femme Johanna et leur bébé Vincent). Vincent angoisse et culpabilise d'être un fardeau (il l'a toujours mal vécu, mais cette fois il a l'impression de "voler le pain" du nouveau-né) pour sa famille et les lettres suivantes assurant qu'une solution serait trouvée, qu'il n'avait pas à s'en faire ne servent à rien. Il décide de se tuer, et essaye (lucidement contrairement aux tentatives précédentes) en se tirant une balle le 27 juillet 1890 dans la poitrine. Il se rate et rentre difficilement dans sa pension il va se coucher. C'est dans la soirée seulement que l'on se rend compte de la situation. Le docteur est appelé mais il ne fait rien, la balle étant près de la colonne vertébrale, il ne décide pas non plus de faire venir un chirurgien ou de transférer Vincent. Théo accourt et accompagne Vincent jusqu'à la fin le 28 juillet. Après la mort de son frère Théo est brisé, il culpabilise de la mort de son frère, et perd littéralement la raison après un conflit avec ses patrons.. en moins de 6 mois, il est interné, fait une crise cardiaque, tombe dans le coma et meurt fin janvier 1891. C'est peu de dire que la fin de ces deux frères fut tragique. Johanna, contrairement aux avis de son propre frère, décide de lire leurs correspondances et finalement de consacrer sa vie à faire connaître l'œuvre de Vincent.


Ce livre est très réussi car-au delà des données purement biographiques- il nous permet de comprendre Vincent:
-Sa relation difficile avec son père.
-La profonde et réciproque amitié qui le liait à son frère Théo (sans qui il n'aurait jamais pu se mettre à la peinture!).
- Son caractère presque impossible. Théo dira d'ailleurs de lui "C'est comme s'il y avait deux personnes en lui, l'une merveilleusement douée, délicate et tendre; l'autre égoïste et de cœur dur. Elles se présentent tour à tour..[...]c'est bien dommage qu'il soit son propre ennemi".......
-et surtout sa relation à la peinture: quelles étaient ses ambitions et sa conception de l'art. On se rend compte de l'importance de sa relation avec la nature, de l'admiration sans borne qu'il lui voue par les longues descriptions de promenades envoyées à Théo, avant même de s'engager dans la peinture. La nature fut d'abord décrite par Vincent avant d'être représentée par la peinture, et la retranscription de l'émotion a toujours été son objectif.
Isolé et inclassable, Vincent est une figure de génie et a marqué la peinture, ouvrant la voie au fauvisme, à l'expressionnisme...

1 commentaire:

  1. Bonjour, Liz. On m'a signalé votre note de lecture. Merci pour ces remarques élogieuses. Si vous me donnez une adresse, je vous enverrai mon dernier roman "Théâtre d'ombres" publié en 2010 chez Denoel. Je suis joignable sur facebook. Bien cordialement. David Haziot.

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